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Les aventures d'un ethnologue dans le grand monde

La loi de Murphy 16 octobre 2010


Alors qu’il participait aux tests d’accélération et de décélération pour l’US Air Force à la fin des années 1940, le major Edward Aloysius Murphy (photo) introduisit l’idée d’utiliser des capteurs pour mesurer les forces exercées sur le harnais du pilote.
Si on pouvait faire en sorte d’avoir du matériel sûr avant de passer à des cobayes vivants c’était aussi bien, en particulier pour éviter au capitaine pilote d’essais John Paul Stapp d’être tué dans l’expérience.
On remarquera avec intérêt que Stapp était docteur en biophysique -excusez du peu-, qu’il fut soumis à des forces atteignant jusqu’à 440 Newton par kilo (!) et que vu ce qu’il avait supporté physiquement il était un fervent partisan de l’installation de ceintures de sécurité dans les véhicules automobiles.
La prochaine fois que vous roulerez sans ceinture de sécurité, essayez de penser à Stapp (avant d’enfoncer le pare-brise avec votre tête).

L’assistant d’Edward Murphy brancha donc les capteurs… mais à l’envers. Résultat officiel : aucune force ne s’applique à la base du harnais et les sangles peuvent être découpées dans de la flanelle. Erreur flagrante qui fut vite récupérée, mais qui aurait pu être très, très lourde de conséquences. Je vois d’ici les regards de Murphy à l’encontre de son assistant… Cela amena le patron à affirmer que si une chose peut être faite d’une bonne et d’une mauvaise façon, il y aura toujours quelqu’un pour la faire de la mauvaise façon.

Boutades, sarcasmes et ironie font partie de la vie professionnelle… mais on se rend rarement compte à quel point ces petites phrases sont pertinentes, quand elles sont ciselées par l’expérience fraîche de micro dysfonctionnements opérationnels. Du coup, l’exclamation du patron fut prise au pied de la lettre par l’équipe, qui l’érigea en principe de prévention sous le nom de loi de Murphy : ce qui peut mal tourner tournera mal.

Dans une perspective de prévention la loi de Murphy permet d’identifier les routes qui mènent à l’erreur pour en bloquer l’accès avant que quiconque s’y engage. Car conformément à la pyramide de Bird, un accident grave c’est six cent occasions manquées de détecter un risque. Et ces risques, ils vous sauteront au visage si vous appliquez un raisonnement à la Murphy.
Cherchez bien… il doit y avoir une marge de progression dans votre œuvre de prévention… avant que le pilote ne soit tué.

Ce genre de stratégie de sécurité permit à Stapp (photo) de s’éteindre paisiblement à 89 ans en 1999, plutôt que de finir démembré avant 1950 par du matériel mal adapté sur une catapulte en acier.

Car après tout Edward Murphy aurait pu renvoyer son assistant fautif. Mais il ne s’agissait pas de punir, il s’agissait de prévoir ce qui pouvait mal tourner pour empêcher que ça se produise. L’erreur de l’assistant était au contraire très importante : il fallait qu’elle soit commise. A cet égard, le comportement de chacun face à l’erreur de quelqu’un d’autre est un révélateur des valeurs de management dans une organisation. Quand une erreur est commise chez vous, la première question qui vous vient à l’esprit est-elle qui ou comment ?
« Qui a commis cette erreur ? Qu’on le renvoie ! » ou bien « Comment cette erreur a-t’elle pu se produire ? Qu’on empêche qu’elle se reproduise ! »

Cette posture du management face à l’échec est éminemment importante car nous savons tous que malgré nos efforts, il y aura des accidents, des foirages et des imprévus forts coûteux, forts destructeurs voire forts mortels.
Au final, il est illusoire de vouloir tout maîtriser car la loi de Murphy est faite de telle manière que penser que vous maîtrisez tout est le signe infaillible d’une faille béante dans votre stratégie de sécurité.
C’est la règle numéro 1 et les militaires ont un adage pour cela : « Espérer le meilleur mais prévoir le pire »
… c’est ici qu’intervient l’intérêt d’avoir un Plan B, une capacité de gestion de crise ou en d’autres termes un moyen quelconque de retomber sur vos pattes en cas de chute, juste pour repousser encore un peu le moment où vous devrez appliquer la procédure PBM.

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L’article qui fait directement suite à celui-ci s’appelle De l’intérêt d’avoir un Plan B.

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3 Responses to “La loi de Murphy”

  1. […] arrive. Seulement voilà, ça arrive. Depuis l’apparition des organismes multicellulaires, la Loi de Murphy  s’applique à tout le monde et il n’y a pas de raison que vous en soyez […]

  2. […] n’est pas pris en compte… il y à là une porte grande ouverte pour faire les frais de la Loi de Murphy quelque soit le niveau de sécurité que vous prétendez […]

  3. […] Une troisième raison est que la plupart beaucoup de soi-disant responsables minimisent encore les risques. Ils n’ont toujours pas compris à quel point une brèche de sécurité peut les mettre à genoux (sans parler du jour où une intrusion réussie permettra un vol et aussi le vandalisme des bases de données). L’excès de confiance ici est un péché mortel et il convient d’éviter de croire qu’on est bien protégé. C’est d’ailleurs le premier signe d’une mauvaise sécurité : lorsque vous êtes sûr d’être bien abrité… demandez à Murphy. […]


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